par Aurélie ARNAUD - Cabinet 2A avocat
Avocat en droit du travail Paris 8
Dans 3 arrêts récents, la Cour de cassation indique comment calculer l’indemnité de requalification, les rappels de salaire dus le cas échéant au salarié à la suite de celle-ci, ainsi que l’indemnité de licenciement abusif et l’indemnité compensatrice de préavis en cas de rupture ultérieure du contrat requalifié (Cass. soc. 8-2-2023 no 21-16.824 FS-B, X. c/ Sté France télévisions; Cass. soc. 8-2-2023 no 21-10.270 FS-B, D. Sté France télévisions; Cass. soc. 8-2-2023 no 21-17.971 FS-B, Sté TV5 Monde c/ X).
La requalification de la relation contractuelle à durée déterminée en contrat à durée indéterminée qui confère au salarié le statut de travailleur permanent de l’entreprise a pour effet de replacer ce dernier dans la situation qui aurait été la sienne s’il avait été recruté depuis l’origine dans le cadre d’un contrat de travail à durée indéterminée.
Elle ouvre droit au profit du salarié au versement d’une indemnité de requalification dont le montant ne peut pas être inférieur à un mois de salaire, sans préjudice des règles relatives à la rupture du contrat à durée indéterminée (article L 1242-5 du Code du travail).
La Cour de cassation vient d’apporter des précisions dans 3 arrêts rendus le 8 février dernier:
1) méthode de calcul de l’indemnité de requalification du CDD
La première affaire (no 21-16.824) concerne une cheffe monteuse engagée selon plusieurs CDD. La salariée saisit le Conseil de Prud'hommes d’une demande en requalification de la relation de travail en contrat à durée indéterminée et en paiement de diverses sommes.
Devant la Cour de cassation, la salariée fait grief d’avoir limité le montant de l’indemnité de requalification en le fixant par référence à la rémunération mensuelle moyenne perçue au cours de l’année 2020, année ayant précédé la rupture du contrat. En effet, si la loi fixe un montant minimal qui ne peut pas être inférieur à un mois de salaire, elle ne donne pas plus de précision sur sa base de calcul exacte.
À cet égard, certains arrêts antérieurs de la chambre sociale ont retenu comme référence la rémunération perçue avant la saisine de la juridiction (Cass. soc. 17-6-2005 no 03-44.900 FS-PBRI : RJS 8-9/05 no 812; Cass. soc. 26-4-2017 no 15-26.817 FS-PB : RJS 7/17 no 462), alors qu’un autre s’est référé à une moyenne, sans préciser la période de référence permettant son calcul (Cass. soc. 20-11-2013 no 12-25.459 F-D : RJS 3/14 no 200).
Dans le présent arrêt, la Cour de Cassation confirme que le montant est calculé selon la moyenne de salaire mensuel dû au titre du contrat dans le dernier état de la relation de travail avant la saisine de la juridiction prud’homale et précise que cette moyenne doit être déterminée au regard de l’ensemble des éléments de salaire, y compris lorsqu’ils ont une périodicité supérieure au mois.
Dès lors, pour fixer le montant minimal de l’indemnité de requalification, il convient d’adopter une vision prospective prenant en considération l’ensemble des conséquences issues de la requalification des contrats.
La Cour d’appel qui, pour fixer le montant de l’indemnité à 1 618,16 €, avait retenu la moyenne des salaires perçus par la salariée au cours de l’année ayant précédé la rupture du contrat, voit naturellement censurer sa décision car, par l’effet de la requalification des CDD en relation de travail à durée indéterminée à temps complet, elle avait fixé, elle-même, la rémunération de base de la salariée à 2 215,89 €.
2) La requalification du CDD replace le salarié dans la situation d’un CDI depuis l’origine
La deuxième (no 21-10.270) et la troisième (no 21-17.971) affaires concernent respectivement une salariée engagée en qualité de journaliste pigiste par plusieurs CDD d’usage et un salarié engagé en qualité de réalisateur, suivant plusieurs contrats de travail à durée déterminée.
Dans ces affaires, le juge a prononcé la requalification des CDD en relation à durée indéterminée, ce que l’employeur ne contestait pas sur le principe.
La question portait, dans les deux cas, sur le calcul de rappels de salaire et accessoires. L’employeur soutenait que le montant global des sommes versées lors des CDD requalifiés était supérieur à celui des sommes dues aux salariés permanents, de sorte que le salarié était rempli de ses droits. Or, le principe de la requalification des CDD en CDI impose une fiction juridique selon laquelle le salarié est replacé, depuis l’origine de la relation, dans la situation qui aurait été la sienne s’il avait conclu en premier lieu un contrat à durée indéterminée. Cette transformation dont les effets remontent dans le temps suppose l’octroi de certaines sommes dues aux salariés en CDI et qui n’ont pas été versées au salarié lors de ses CDD requalifiés.
La Cour de Cassation confirme, d’abord, que les sommes qui ont pu être versées au salarié et étaient destinées à compenser la situation dans laquelle il était placé du fait de son contrat à durée déterminée lui restent acquises nonobstant une requalification ultérieure en contrat à durée indéterminée.
Dans la deuxième affaire (no 21-10.270), la Cour d’appel, qui avait rejeté la demande de la salariée, voit donc sa décision censurée, la Cour de cassation jugeant que les sommes versées à la salariée, en sa qualité de pigiste, étaient destinées à compenser la situation dans laquelle elle était placée du fait de ses contrats à durée déterminée, de sorte qu’elles lui restaient acquises nonobstant la requalification ultérieure.
À l’inverse, dans la troisième affaire (no 21-17.971), la Cour d’appel qui avait accueilli la demande du salarié voit sa décision confirmée par la Cour de cassation. Pour elle, le salarié pouvait prétendre à des rappels de primes d’ancienneté, de fin d’année et de sujétion, sans qu’il y ait lieu de tenir compte des sommes versées par l’employeur en exécution des divers CDD au titre du salaire de base.
La troisième affaire (no 21-17.971) donne également à la Cour l’occasion de déterminer l’assiette de l’indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse, d’une part, et celle de l’indemnité compensatrice de préavis, d’autre part, dues en cas de rupture ultérieure par l’employeur du contrat requalifié.
3) L’indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse est assise sur les salaires perçus en CDD…
L’employeur faisait grief à l’arrêt qui, pour le condamner au versement d’une certaine somme à titre d’indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse, avait pris en considération les sommes versées au titre du statut d’intermittent, dont le montant était supérieur au salaire que le salarié aurait perçu en CDI.
Partant du principe que la requalification des CDD en relation à durée indéterminée a pour effet de replacer le salarié dans la situation qui aurait été la sienne s’il avait été embauché depuis l’origine en CDI, l’employeur faisait valoir que le salaire de base servant d’assiette à l’indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse devait être celui que le salarié aurait perçu en CDI.
Rappelant, cette fois encore, que les sommes versées au salarié en sa qualité d’intermittent, destinées à compenser la situation dans laquelle il était placé du fait de son contrat à durée déterminée, lui restaient acquises, la Cour de cassation en déduit que les juges du fond, qui, pour déterminer le montant de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, ont pris en compte les sommes perçues par le salarié au titre du salaire de base brut d’intermittent qui lui étaient définitivement acquises, ont fait une exacte application de l’article L 1235-3 du Code du travail.
Rappelons que cet article prévoit, en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse, si l’une ou l’autre des parties refuse la réintégration du salarié, l’octroi par le juge d’une indemnité à la charge de l’employeur, dont le montant est compris dans une fourchette fixée par le texte par référence au mois de salaire brut.
4) … contrairement à l’indemnité compensatrice de préavis
L’employeur contestait, de la même manière, le mode de calcul de l’indemnité compensatrice de préavis. Selon lui, son montant doit être égal au montant des salaires que le salarié aurait perçus s’il avait travaillé pendant la durée du préavis.
Or, par l’effet de la requalification des CDD en relation à durée indéterminée, le salarié devait être replacé dans la situation d’un salarié permanent de l’entreprise, de sorte que, selon lui, l’assiette de l’indemnité compensatrice de préavis devait exclure les sommes versées dans le cadre des CDD.
Au visa des articles L 1234-1 et L 1234-5 du Code du travail, la Cour de cassation confirme d’abord que l’indemnité compensatrice de préavis due au salarié est égale au montant des salaires qu’il aurait perçus s’il avait travaillé pendant la durée du préavis et rappelle l’effet de la requalification de la relation contractuelle en contrat à durée indéterminée qui confère au salarié le statut de travailleur permanent de l’entreprise depuis l’origine.
Elle censure, ensuite, l’arrêt d’appel qui, pour calculer l’indemnité compensatrice de préavis, avait retenu le montant des salaires perçus pendant l’exécution des contrats à durée déterminée. Selon elle, par l’effet de la requalification en contrat à durée indéterminée, l’indemnité de préavis devait être calculée au regard des sommes que le salarié aurait perçues en application du statut de travailleur permanent qui lui avait été reconnu.
Comme pour le calcul des rappels de salaires et accessoires, cette décision suppose, pour l’indemnité compensatrice de préavis, d’avoir une vision prospective et de faire reposer le calcul sur le salaire théorique reconstitué correspondant au CDI, de manière à prendre en compte pleinement les effets de la requalification de la relation contractuelle.
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