Un certificat médical de complaisance désigne un certificat établi par un médecin attestant, de manière délibérément inexacte ou sans base médicale objective, d’un état de santé, d’une pathologie, ou d’une incapacité, dans le but de favoriser indûment la personne concernée.
L’article R. 4127-28 du Code de la santé publique interdit explicitement la délivrance d’un rapport tendancieux ou d’un certificat de complaisance.
L’article 28 du Code de déontologie médicale rappelle cette règle et indique en commentaires :
« La signature d’un médecin bénéficie par principe d’un grand crédit, et toute erreur ou compromission de sa part fait, notamment au corps médical entier, un tort considérable.
En cas de fraude ou de déclaration mensongère, les sanctions encourues devant les tribunaux sont sévères comme le prévoit l’article 441-7 du code pénal (voir note [1]).
Le médecin fautif est passible en outre de sanctions disciplinaires de la part des juridictions ordinales.
Il faut souligner plusieurs points :
- Le médecin ne doit certifier que ce qu’il a lui-même constaté. Ont été sanctionnés des médecins dont les certificats avaient été rédigés sans examen du patient.
- Si le certificat rapporte les dires de l’intéressé ou d’un tiers, le médecin doit s’exprimer sur le mode conditionnel et avec la plus grande circonspection ; le rôle du médecin est en effet d’établir des constatations médicales, non de recueillir des attestations ou des témoignages et moins encore de les reprendre à son compte.
- Un certificat médical ne doit pas comporter d’omission volontaire dénaturant les faits.
Cela suppose un examen et un interrogatoire préalables soigneux.
- Il y a des demandes de certificat que le médecin doit rejeter. S’il est tenu de délivrer à son patient un certificat des constatations médicales qu’il est en mesure de faire, il reste libre du contenu du certificat et de son libellé qui engagent sa responsabilité ».
Le Conseil national des médecins précise et impose les règles suivantes :
- « la prescription d’un arrêt de travail est tout d’abord un acte thérapeutique destiné à un patient dont l’état de santé le requiert. Il engage pleinement la responsabilité du médecin et doit être effectué dans le respect des règles déontologiques (articles 28, 50 et 76 du Code de déontologie médicale) »,
- « comme le précise l’article 28 du Code de déontologie médicale : « la délivrance d’un rapport tendancieux ou d’un certificat de complaisance est interdite » »
- « Effectuer la prescription uniquement après examen du patient et à la date du jour de cet examen »
« Le début de l’arrêt de travail, justifiant l’attribution des indemnités journalières de l’assurance maladie, ne peut être fixé à une date antérieure à sa constatation par le médecin traitant. La prescription d’un arrêt de travail ne peut être effectuée qu’après examen »
Risques et sanctions pour le médecin
Les médecins qui rédigent des certificats de complaisance encourent des sanctions disciplinaires et pénales.
Sur le plan disciplinaire, le Conseil de l’Ordre des médecins peut être saisi par toute personne s’estimant lésée de manière suffisamment directe et certaine, par exemple l’employeur du salarié qui a bénéficié d’un certificat ou arrêt de travail de complaisance.
En l’absence de conciliation, la chambre disciplinaire de l’Ordre peut alors prononcer des sanctions allant de l’avertissement au blâme, voire à la radiation, selon la gravité des faits.
Dans le cas d’une salariée qui avait bénéficié de deux arrêts de travail sans preuve d’une visite auprès du médecin, la Chambre disciplinaire de première instance d’Île-de-France de l’Ordre des Médecins a jugé :
« il n’est pas établi par le praticien, en l’absence notamment de production de l’extrait intégral de son livre de recettes pour la journée du 25 mai, que le Docteur B. a bien reçu la patiente une première fois le 25 mai, et une seconde fois le 29 mai ; qu’en outre la société T. établit avoir reçu le premier avis d’arrêt de travail le 31 mai 2018 expédié le 30 mai, ce qui rend peu vraisemblable le motif allégué de la visite de la patiente le 29 mai où lui a été délivré le second avis ».
Pour la Chambre disciplinaire de première instance d’Île-de-France de l’Ordre des Médecins, ces « faits reprochés et fautifs justifient, dans les circonstances de l’espèce, de prononcer à l’encontre du Docteur B. la sanction de blâme » et « il convient de mettre à la charge du Docteur B. le versement à la société T. de la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par celle-ci et non compris dans les dépens ». Chambre disciplinaire de première instance d’Île-de-France de l’Ordre des Médecins, 8 juin 2020, n° C.2018-6523
Sur le plan pénal, l’établissement d’un certificat de complaisance peut tomber sous le coup de l’article 441-7 du Code pénal, qui prévoit jusqu’à un an d’emprisonnement et 15 000 euros d’amende (porté à 3 ans et 15 000 euros d’amende en cas de préjudice au Trésor public ou au patrimoine d’autrui) pour l’établissement d’un certificat faisant état de faits matériellement inexacts.
Risques pour le salarié
Du côté du salarié, la production d’un certificat médical de complaisance peut également avoir de lourdes conséquences. Si l’employeur parvient à démontrer que le certificat médical produit est un certificat de complaisance, le salarié s’expose à une sanction disciplinaire pour absence injustifiée par exemple, pouvant aller jusqu’au licenciement pour faute grave.
Procédure de contestation du certificat de complaisance
L’employeur qui suspecte un certificat médical de complaisance peut saisir le Conseil de l’Ordre des médecins sur le fondement de l’article R. 4127-28 du Code de la santé publique.
En cas de contentieux prud’homal notamment, il peut soutenir que le certificat litigieux est contraire aux dispositions du Code de la santé publique et n’a donc aucune force probante.