L'astreinte en droit du travail est une période pendant laquelle le salarié, sans être sur son lieu de travail et sans être à la disposition permanente et immédiate de l'employeur, doit être en mesure d'intervenir pour accomplir un travail au service de l'entreprise (article L 3121-9 du Code du travail).
Pour qu'il y ait astreinte, 2 conditions doivent être réunies :
-son lieu d'exécution (hors interventions) ne doit pas être le lieu de travail du salarié ; les permanences effectuées au sein de l'entreprise ou en un autre lieu imposé par l'employeur, sauf dans un logement de fonction, sont du temps de travail effectif ;
-les sujétions imposées au salarié ne doivent pas aboutir à le mettre à la disposition permanente et immédiate de l'employeur ; en pratique, doit être évoqué le cas des permanences effectuées à partir d'un logement de fonction, dans lequel les contraintes empêchant le salarié de vaquer à des occupations personnelles (interventions rapprochées dans le temps, mission de surveillance, etc.) peuvent lui être plus facilement imposées.
Si le salarié est en période d'astreinte, mais qu'il n'est pas contacté par son employeur :
- il ne s'agit pas de temps de travail effectif, il n'est pas donc pas payé selon son salaire habituel pour la période d'astreinte,
- mais il perçoit ce qu'on appelle une contrepartie soit en argent soit sous forme de repos.
Si le salarié est en période d'astreinte, et qu'il est contacté pour réaliser une intervention, il faut distinguer 2 temps :
- le temps sans intervention (qui correspond à la période d'astreinte)
Il ne s'agit pas d'un temps de travail effectif (si le salarié est bien en mesure de vaquer à ses occupations personnelles), cette période est donc prise en compte pour le calcul des repos (quotidien et hebdomadaire).
Il n'est donc pas payé (comme du salaire), mais en revanche, il perçoit une contrepartie.
- le temps d'intervention qui est considéré comme du temps de travail effectif et donc payé normalement comme du salaire (ou en heures supplémentaires en cas de dépassement de la durée du travail applicable)
Par temps d'intervention, il faut comprendre : temps de trajet aller + temps d'intervention sur place + temps de trajet retour.
Attention aux dérives: la Cour de Cassation vient à nouveau de le rappeler dans un arrêt du 14 mai 2025 (n°24-14319).
En effet, un salarié qui est d'astreinte mais qui serait un peu trop sollicité peut réclamer le paiement d'heures supplémentaires si l'intensité des contraintes l'empêche de vaquer librement à ses occupations personnelles.
Si le salarié est d'astreinte, mais qu'en réalité, il est amené à intervenir régulièrement, et qu'il est donc soumis à des contraintes d'une intensité telle qu'elles avaient affecté, objectivement et très significativement, sa faculté de gérer librement, au cours de ces périodes, le temps pendant lequel ses services professionnels n'étaient pas sollicités et de vaquer à des occupations personnelles.
On sort alors du régime de l'astreinte, et en cas de contentieux, le salarié peut faire constater qu'il s'agit en réalité de temps de travail effectif et faire condamner l’employeur au paiement d'heures supplémentaires des heures d'astreinte.
C'est ce que rappelle la Cour de cassation sur la base de la jurisprudence européenne:
Une Cour d’appel ne saurait retenir que le temps d’astreinte du salarié n’était pas un temps de travail effectif en relevant que ses interventions au titre de l’accès des clients à l’hôtel ne pouvaient qu’être limitées durant la nuit qu’il passait à l’hôtel compte tenu de l’existence d’une borne d’accès 24heures sur 24 alors qu’elle constatait que le salarié était amené à intervenir régulièrement pendant les périodes d’astreinte compte tenu de la vétusté des lieuxetdu matériel de l’hôteletsans vérifier si l’intéressé, qui soutenait que son numérode téléphone figurait sur la borne automatique de l’hôtel, avait été soumis, au cours de ces périodes, à des contraintes d’une intensité telle qu’elles avaient affecté, objectivementettrès significativement, sa faculté de gérer librement, au cours de ces périodes, le temps pendant lequel ses services professionnels n’étaient pas sollicitésetde vaquer à des occupations personnelles (Cass.soc.14-5-2025 no24-14.319F-B).