par Aurélie ARNAUD - Cabinet 2A avocat
Avocat en droit du travail Paris 8
Ce sont a priori deux notions qui ne vont pas ensemble.
Sur quel fondement un salarié au forfait jours peut-il alors solliciter un rappel d'heures supplémentaires devant le Conseil de Prud'hommes ?
Rappel du mécanisme du forfait jours
La convention ou l'accord collectif détermine le nombre de jours travaillés dans la limite de 218 jours.
Dans la limite posée par l'accord, la convention individuelle de forfait doit fixer le nombre de jours travaillés. À défaut, elle est nulle (Cass. soc. 12-3-2014 n° 12-29.141 FS-PB) et le salarié peut prétendre au paiement des heures supplémentaires accomplies (Cass. soc. 1-12-2009 n° 07-44.010 F-D).
La durée de travail du salarié au forfait en jours est décomptée chaque année par récapitulation du nombre de journées ou demi-journées travaillées.
Le salarié bénéficie des repos quotidien et hebdomadaire, mais n'est concerné ni par la durée légale hebdomadaire du travail ni par les dispositions relatives aux heures supplémentaires et aux durées maximales journalière et hebdomadaire du travail.
Les heures réalisées le dimanche ne sont pas des heures supplémentaires (Cass. soc. 21-9-2022 n° 21-14.106 FS-B).
Les jours d'absence pour maladie ne peuvent pas être récupérés, de sorte que le nombre de jours du forfait est réduit d'autant (Circ. DRT 7 du 6-12-2000).
Les jours de congés d'ancienneté conventionnels acquis par le salarié sont pris en compte pour la détermination du plafond du nombre de jours travaillés fixé par la convention de forfait (Cass. soc. 3-11-2011 n° 10-18.762 FS-PB).
Le salarié peut dépasser le nombre de jours travaillés fixés par la convention en renonçant à des jours de repos. Le dépassement du forfait en dehors de ce dispositif ne rend pas nulle ou sans effet la convention de forfait (Cass. soc. 24-10-2018 n° 17-12.535 F-D). Il revient alors au juge de fixer le taux de la majoration de salaire due en contrepartie du temps de travail effectué au-delà du forfait (Cass. soc. 26-1-2022 n° 20-13.266 FS-BR).
La convention de forfait annuel en jours n'instaure pas au profit du salarié un droit à la libre fixation de ses horaires de travail, indépendamment de toute contrainte liée à l'organisation du travail par l'employeur dans l'exercice de son pouvoir de direction (Cass. soc. 2-2-2022 n° 20-15.744 F-D).
Les documents comptabilisant le nombre de jours travaillés doivent être tenus par l'employeur à la disposition de l'inspecteur du travail pendant 3 ans (C. trav. art. D 3171-16).
La rémunération est fixée librement par les parties dans la convention de forfait. En l'absence de référence horaire, il n'y a pas à comparer son montant avec l'application des majorations pour heures supplémentaires.
Lorsque le salarié perçoit une rémunération manifestement sans rapport avec les sujétions qui lui sont imposées, il peut, même en présence d'une clause conventionnelle ou contractuelle contraire, saisir le juge judiciaire afin d'obtenir une indemnité calculée en fonction de son préjudice, eu égard notamment au niveau du salaire pratiqué dans l'entreprise et correspondant à sa qualification.
Le juge doit s'assurer que le salarié remplit les conditions requises pour se voir appliquer un forfait annuel en jours. À défaut, l'intéressé ne peut pas prétendre à l'indemnité, mais à un rappel de salaire pour ses heures supplémentaires (Cass. soc. 31-10-2007 n° 06-43.876 FS-PBR).
Suivi du forfait jours
Voir également notre précédent article sur ce point ici
L'employeur est tenu de s'assurer régulièrement que la charge de travail du salarié soumis à une convention de forfait en jours est raisonnable et permet une bonne répartition dans le temps de son travail.
L'accord collectif autorisant la mise en place de forfaits en jours doit fixer les modalités selon lesquelles :
- l'employeur assure l'évaluation et le suivi régulier de la charge de travail du salarié ;
- l'employeur et le salarié échangent périodiquement sur la charge de travail du salarié, l'articulation entre son activité professionnelle et sa vie personnelle, sa rémunération, ainsi que sur l'organisation du travail dans l'entreprise ;
- le salarié peut exercer son droit à la déconnexion.
La Cour de cassation exige quant à elle que l'accord collectif protège la santé et la sécurité du salarié, en garantissant le respect de durées raisonnables de travail et des repos journaliers et hebdomadaires (Cass. soc. 5-10-2017 n° 16-23.106 FS-PB), ainsi que le caractère raisonnable de l'amplitude et de la charge de travail et une bonne répartition du travail dans le temps (Cass. soc. 17-1-2018 n° 16-15.124 F-PB). Remplit ces conditions l'accord imposant à l'employeur de veiller à la surcharge de travail du salarié et d'y remédier (Cass. soc. 8-9-2016 n° 14-26.256 FS-PB; 22-6-2017 n° 16-11.762 FS-PB), mais pas celui faisant peser sur le seul salarié le suivi de l'exécution du forfait (Cass. soc. 14-5-2014 n° 12-35.033 FS-PB ; 8-11-2017 n° 15-22.758 FS-PB).
En l'absence de stipulations conventionnelles relatives au suivi de la charge de travail des salariés sous convention de forfait en jours et aux échanges avec l'employeur sur ce sujet, l'employeur peut valablement conclure une telle convention si (article L3121-65 du Code du travail) :
- il établit un document de contrôle mentionnant la date et le nombre de journées ou demi-journées travaillées. Ce document peut être renseigné par le salarié sous la responsabilité de l'employeur ;
- il s'assure de la compatibilité de la charge du travail du salarié avec le respect des temps de repos quotidien et hebdomadaire ;
- il organise un entretien annuel avec le salarié pour évoquer sa charge de travail, l'organisation de son travail, l'articulation entre son activité professionnelle et sa vie personnelle ainsi que sa rémunération.
En l'absence de stipulations conventionnelles relatives au droit à la déconnexion, les modalités d'exercice de ce droit par le salarié sont définies par l'employeur et communiquées par tout moyen aux salariés concernés.
Le régime des heures supplémentaires s'applique si une convention individuelle de forfait est conclue en application d'une convention collective invalide (Cass. soc. 14-5-2014 n° 12-35.033 FS-PB ; 24-3-2021 n° 19-12.208 FS-PI) ou si elle est exécutée de façon défectueuse par l'employeur (en l'absence de suivi par exemple de la charge de travail, des jours travaillés, d'entretien sur ce point...).
La preuve du respect de l'accord collectif incombe à l'employeur (Cass. soc. 19-12-2018 n° 17-18.725 F-PB). La convention de forfait est nulle dans le premier cas (Cass. soc. 24-4-2013 n° 11-28.398 FS-PB ; 10-3-2021 n° 19-17.672 F-D ) et privée d'effet à compter de la défaillance de l'employeur dans le second (Cass. soc. 2-7-2014 n° 13-11.940 FS-PB ; 22-6-2016 n° 14-15.171 FS-PB).
Le salarié est recevable à contester la validité de la convention de forfait dès lors que sa demande de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires n'est pas prescrite (Cass. soc. 27-3-2019 n° 17-23.314 FS-PB7), une telle demande se prescrivant par 3 ans (Cass. soc. 30-6-2021 n° 18-23.932 FS-B). Toutefois, l'employeur peut demander le remboursement des jours de repos octroyés en application d'une convention nulle ou privée d'effet (Cass. soc. 6-1-2021 n° 17-28.234 F-PB). Ce montant est alors déduit des sommes dues au titre des heures supplémentaires.
S'agissant de la preuve des heures supplémentaires, vous pouvez consulter notre précédent article sur ce point.
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